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Le retour de la gabelle

Publié le par Jaume Ribera

La gabelle!...
Parmi tous les impôts et toutes les taxes que nous devons payer, c'est sans doute l'une de celles qui est la plus impopulaire. D'abord parce qu'elle concerne tout le monde au sujet de la possession d'un produit qui nous est essentiel. Ensuite parce qu'elle est longtemps restée inconnue dans notre région.

Vous le savez certainement: la gabelle est l'impôt sur le sel. Sur sa possession, plus précisément. Quoi que vous en fassiez, et même si vous vous contentez d'en garder des sacs auxquels vous ne touchez jamais et dont vous n'utilisez jamais le contenu (quelle drôle d'idée!...), vous devez payer cette taxe.

Or du sel, nous en utilisons. Nous en utilisons même beaucoup. Parce que c'est encore le meilleur moyen de conserver une certaine fraîcheur aux aliments que nous allons consommer.

Il n'y a pas mieux que les salaisons ou les saumures pour garder les aliments consommablesIl n'y a pas mieux que les salaisons ou les saumures pour garder les aliments consommables

Il n'y a pas mieux que les salaisons ou les saumures pour garder les aliments consommables

Nous sommes une région où il fait chaud. Parfois même très chaud, comme en ce torride été 1662 que nous vivons en ce moment.
Couvrir les produits frais de sel leur permet de rester propres à la consommation. D'autant plus que nous sommes voisins de la mer, et qu'il y a longtemps eu des pêcheurs dans notre région. Il y en a moins en ce moment, mais on continue à consommer du poisson. Une denrée qui se dégrade vite, et à laquelle le sel permet d'assurer une consommation saine. On sait cela depuis les plus anciens temps.

C'est sans doute pour cela qu'à la fin du XIII° siècle (1283, me dit Francisco, bien plus savant que moi avec les dates), le roi de l'époque Pere III el Gran, roi d'Aragon, exempta tout le pays catalan de l'impôt sur le sel.
Bon! Il y avait sûrement d'autres raisons, plus politiques: c'était l'époque de sa grande querelle avec son frère Jaume II, qui venait de s'émanciper en fondant le royaume de Majorque, avec Perpignan pour capitale.

Deux frères qui se firent la guerre toute leur vie

Quoi qu'il en soit, nos contrées catalanes du nord des Pyrénées étaient exemptées de cet impôt depuis lors. En 1659, nous sommes passés sous l'autorité du royaume de France. Mais lors de son voyage chez nous, l'année suivante, notre nouveau roi (Louis XIV donc) l'a affirmé haut et fort à plusieurs reprises: pas question de toucher à nos privilèges coutumiers!
L'affaire était donc simple: gabelle il n'y avait pas dans le passé, gabelle il n'y aurait pas à l'avenir!...

Et sur ce, surprise!...
Au début de cette année (1662, donc), nous apprenons qu'à Paris le roi vient de décider de soumettre la plupart d'entre nous à cette taxe. Vous imaginez l'impopularité de cette décision.
Aussitôt, les vieilles routes de la contrebande du sel qui avaient été florissantes durant des siècles entre le Roussillon et le Languedoc se sont réorganisées; le pouvoir royal a envoyé des contrôleurs chargés de vérifier si tous ceux qui possédaient du sel avaient payé leurs taxes dessus; et les incidents, parfois violents, ont débuté.

Alors même si le commerce du sel n'atteint pas chez nous le volume qu'il a dans certaines régions, où les greniers à sel sont parfois impressionnants par leur taille, quelque chose me dit que nous n'avons pas fini d'entendre parler de cette maudite gabelle, de ce côté des Pyrénées!...

Tout est mesuré, pesé, taxé...
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Le canal de Cabestany

Publié le par Patrick Dombrowsky

Le canal de Cabestany

Encore une fois, merci à l'aide familiale!

Cabestany, pour moi, ce n'est pas n'importe où!... J'avais seulement 10 ans quand mes parents y ont acquis un terrain où, petit à petit, à force de courage, Papa y a construit notre maison. J'avais 17 ans quand j'en suis parti pour mes études à Paris. J'avais 42 ans quand elle fut vendue, car désormais trop grande et trop fatigante à faire vivre et à entretenir.

Autant vous dire que ce lieu représente une partie majeure de ma vie!

Je m'étais promis, quand les aventures de Jaume Ribera ont germé dans ma tête, qu'une d'entre elles l'entraînerait sur ces lieux. Par ce quatrième roman, c'est désormais chose faite: mon serment personnel est tenu.

C'est peut-être pour cela que l'enquête est différente. Elle ne cherche pas à résoudre un meurtre, comme les autres. Mais c'est en tant que médecin que Jaume va devoir y affronter une soudaine et meurtrière maladie inconnue. Qui l'amènera à bien d'autres développements, qui sollicitèrent aussi ses talents d'enquêteur...
Et pour répondre à une question qui m'a été plusieurs fois posée: non, cela n'a aucun rapport avec l'épidémie surgie dans le monde en 2019. D'ailleurs le livre a été publié quelques mois avec l'apparition de la Covid-19.

Bien sûr, ce roman est parsemé de clins d'œil personnels, autour de ces lieux que j'ai tant connus et aimés...

Mais ça, c'est mon secret à moi...

Publié dans Mes enquêtes

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Le novice de Serrabona

Publié le par Patrick Dombrowsky

Le novice de Serrabona

Avec, à nouveau, l'aide familiale pour la couverture

On ne sait que rarement les tribulations que subit une histoire entre le moment où est écrite la première phrase, et celui où arrive (enfin!) le point final. Il y a en effet d'innombrables raisons pour l'auteur de faire évoluer son récit, ses personnages, son enquête...
Le novice a été particulièrement chamboulé par rapport à ce que j'avais pensé en faire initialement. Comme l'annonçaient d'ailleurs assez explicitement les dernières pages du roman précédent (Les anges de Saint Genis), Jaume mon enquêteur allait partir à la rencontre de la grande Histoire, dans la bourgade cerdane de Llívia.

Et puis... Un meurtre à résoudre, encore une fois, l'a arrêté en route; d'autant que son ami Francisco Llonch semblait y être mêlé.

Et surtout, je n'ai pas tardé à me rendre compte qu'il serait assez difficile de rendre chronologiquement crédible un déplacement en Cerdagne, au milieu du XVII° siècle, dans le cadre d'un livre pas trop épais...

Alors, privilège exclusif de l'auteur, j'ai tout modifié en cours de route. Et j'en ai profité par remplacer les réels personnages historiques (il en reste quand même...) par plusieurs de ... mes propres ancêtres, qui viennent ainsi rejoindre Jaume Ribera lui-même dans la galerie de mes personnages de roman.

Puissent-ils, là où ils sont, me pardonner des rôles que je leur ai fait jouer!

Publié dans Mes enquêtes

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Les Anges de Saint Genis

Publié le par Patrick Dombrowsky

Les anges de Saint Genis

J'en avais commencé la rédaction avant même que soit publié le roman précédent. Mais c'est cette édition qui a brusquement accéléré l'écriture du livre. Puisque j'avais découvert les mérites de l'auto-édition, ses inconvénients étaient désormais insuffisants à constituer un réel frein pour moi: Jaume Ribera pouvait vivre d'autres aventures.

Les anges de Saint Genis, c'est un drame familial sur fond d'intrigues locales. Une jeune héritière est découverte assassinée et cruellement mutilée, dans le voisinage de l'antique château de Tatzo. Or, celui-ci sert à l'occasion de repère aux insurgés menant la lutte contre le nouveau pouvoir français. Sont-ils coupables? À moins qu'il faille chercher du côté de l'abbaye de Saint Genis des Fontaines, dont le nouveau prieur est un bien étrange personnage. Ou au sein même de la famille, dans l'entrelacs des haines recuites et des jalousies dévorantes fermentant dans leur vaste propriété de Vilaclara...

Finalement, cette histoire dense m'a entraîné bien plus loin que je le pensais, et le livre est beaucoup plus épais que son prédécesseur. Cela ne l'a pas privé d'un parcours qui m'a offert bien des satisfactions.
Le coup de cœur de l'éditeur, d'abord... Dans le nombre important de publication, ils en décernent quelques uns par an, m'a-t-on expliqué. Coup de cœur attribué avec un commentaire plus que sympathique:

Un bon gros roman policier, historique... riche en rebondissements, en questions, en moments agréables à savourer sur la plage, sur l'herbe... où vous voudrez ! ce sera du plaisir...

Un prix littéraire, ensuite. Au moment de la parution de mon roman, en effet, TheBookEdition.com venait de créer le premier concours du meilleur polar auto-édité.
J'y ai présenté Les anges de Saint Genis. Et le livre a obtenu le Prix des Lecteurs, décerné en mars 2015 lors du Salon du Livre!...

Avec les membres du jury 2015

Même si ce n'est pas le Goncourt, une distinction fait toujours plaisir, n'est-ce pas?...

Publié dans Mes enquêtes

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Le fanal de Madeloc

Publié le par Patrick Dombrowsky

Le fanal de Madeloc

Avec un dessin fait en famille comme première couverture

Un souvenir d'enfance me revient en mémoire, au moment d'écrire quelques lignes sur ce roman. Dans la bibliothèque de mon grand-père, passionné de montagne, un titre me fascinait parmi ses nombreux ouvrages de Roger Frison-Roche: Premier de cordée.
Le fanal de Madeloc, c'est un peu mon premier de cordée. Celui qui a tout lancé; celui sans lequel le reste n'aurait pas pu voir le jour.
Sept ans se sont écoulés entre les premières lignes griffonnées au bord d'une piscine vendéenne, et son auto-édition chez TheBookEdition.com.

L'histoire d'un corps découvert au pied de l'antique tour de guet de Madeloc, au lendemain de la visite de Louis XIV dans sa nouvelle cité de Perpignan. La quête d'un enquêteur qui le devient presque par hasard. La découverte des complots, des intrigues, des faux-semblants agitant ces premiers mois de l'annexion au Royaume de France.

Un premier roman suffisamment crédible pour permettre finalement son édition, pour de vrai, dans le circuit des éditeurs professionnels. Les éditions Marenostrum, de Perpignan, le publièrent en 2013.
 

Hélas, le contrat de confiance qui doit lier un auteur et son éditeur n'a jamais été respecté. J'ai donc dû résilier cet engagement. Et j'ai récupéré tous les droits sur le livre.

Publié dans Mes enquêtes

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L'anse de Paulilles

Publié le par Jaume Ribera

Tout le long de la côte rocheuse qui commence au sud d'Argelès, se succèdent de nombreuses petites criques. Je me souviens de vous en avoir parlé. C'est un ensemble finalement assez mal connu, très peu peuplé, et dans lequel se sont développés, durant les longues années de guerre que notre région a connues, de multiples trafics.

L'anse de Paulilles est l'une de ces criques. Ni plus, ni moins notable que les autres.
Si ce n'est qu'elle est plus vaste, entre le cap Béar qui la sépare de Banyuls au Nord, et le cap que nous appelons Coustodou, et dont Patrick me dit que vous l'appelez désormais Oullastrell, au Sud.

Un paysage de roches et de maigre végétation

La plupart de ces criques sont surtout accessibles par la mer.
À Paulilles, toutefois, il est aussi possible de venir par la terre. Le minuscule ruisseau qu'on appelle Rec de Cosprons vient en effet finir sa course au centre de la crique. Il descend des pentes de la Madeloc, en traversant toutes les terres du hameau de Cosprons. Ce mince couloir permet une réelle communication entre ce dernier et la mer. D'ailleurs, je vous l'ai raconté, l'histoire du hameau est très dépendante de l'étendue maritime.

C'est pour cela que cette anse est témoin d'une grande activité clandestine. La proximité de Cosprons compense le côté passablement désertique des abords.

Évidemment, il vaut mieux connaître ou être bien guidé...

Ceux-ci assurent la discrétion; mais les habitations somme toute assez voisines peuvent servir de refuges proches, en cas de nécessité.

Or j'ai entendu dire que depuis quelques temps, il y a une reprise des activités nocturnes, du côté de Paulilles.
Et que de mystérieux navires s'approchent des côtes, parfois la nuit...

L'anse aurait-elle repris du service?
Je vous en reparlerai...

Publié dans Ma région

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Qui nous gouverne, finalement?

Publié le par Jaume Ribera

C'est une question qui peut surprendre, tant la réponse paraît évidente: eh bien le Roi, bien sûr!... C'est-à-dire Louis XIV depuis que nous sommes devenus Français...

Mais il n'en est bien sûr rien dans la réalité quotidienne qui est la nôtre. Louis XIV ne représente pas encore grand chose dans la région, à part peut-être pour ceux qui ont assisté à son arrivée et à ses déplacements dans Perpignan lors de sa venue en avril 1660, et qui ont fugacement pu apercevoir sa silhouette à l'intérieur des coches qui le conduisaient d'un endroit à l'autre. Et encore Louis a-t-il peu bougé, tant il faisait mauvais et tant il a plu, durant son séjour dans sa nouvelle province.
Mais c'est tout! Comment pourrait-il en être autrement, d'ailleurs? Le traité qui nous a rattachés au Royaume de France ne date que de novembre 1659. Deux ans plus tard, la langue que nous parlons est toujours le catalan; les lois que nous appliquons sont toujours celles de la monarchie espagnole et des usages catalans, que Louis a d'ailleurs pleinement confirmés; les monnaies que nous utilisons (quand nous ne leur préférons pas plus simplement le troc) sont espagnoles ou plus souvent purement locales.

Aux monnaies françaises (à gauche) ou espagnoles (à droite), nous préférons souvent les pellofes locales (un exemple au centre)Aux monnaies françaises (à gauche) ou espagnoles (à droite), nous préférons souvent les pellofes locales (un exemple au centre)Aux monnaies françaises (à gauche) ou espagnoles (à droite), nous préférons souvent les pellofes locales (un exemple au centre)

Aux monnaies françaises (à gauche) ou espagnoles (à droite), nous préférons souvent les pellofes locales (un exemple au centre)

Autant dire qu'il faudra sans doute longtemps à la Couronne de France pour absorber notre région dans son système politique et social. Et que ce n'est pas l'image d'un roi forcément lointain de nous qui y changera quelque chose.
D'où l'importance des institutions mises en place pour nous diriger. Dans un premier temps, c'est le Gouverneur de la province qui a eu tous les pouvoirs. Durant les dernières années de la guerre, c'est François de Sagarre qui occupa le poste. Il a francisé son nom, mais en fait il est Catalan, originaire de Lleida. Rallié depuis longtemps aux intérêts français, il en a été récompensé par ce poste éminent, ce qui lui valut une franche détestation dans toute la province. D'ailleurs sitôt celle-ci définitivement annexée, Paris a préféré confier la fonction de gouverneur à un Français, venu des confins du Limousin et du Périgord: Anne de Noailles. Ceux d'entre vous qui ont lu le récit de mes enquêtes savent que je l'ai rencontré plusieurs fois et que, finalement, nous nous apprécions mutuellement.
 

François de Sagarre et Anne de Noailles, nos deux gouverneurs successifsFrançois de Sagarre et Anne de Noailles, nos deux gouverneurs successifs

François de Sagarre et Anne de Noailles, nos deux gouverneurs successifs

Mais là n'est pas la question! Il se dit beaucoup, ces derniers temps, que Noailles est de moins en moins présent dans la province. Non pas qu'il se désintéresse de sa fonction, non! Mais le poste de gouverneur ne comblerait pas suffisamment ses ambitions; après tout, il est militaire et la région est en paix, désormais. Ce n'est pas ici qu'il pourra faire prospérer sa carrière. Mais surtout, sans doute lassés par la persistance des complots permanents qui naissent ici, ceux qui entourent le Roi à Paris veulent plus s'appuyer sur des instances spécifiquement locales, supposées plus capables de s'y retrouver entre tous les clans.

C'est ainsi que s'est produite, au cours des années 1660 et 1661, la mise en place du Conseil Souverain du Roussillon, qui a absorbé toutes les instances déjà en place.

Un palais ancien au cœur de Perpignan pour ce nouveau lieu de pouvoir

Logée dans le très ancien Palais de la Députation, à deux pas de la Loge de Mer qui est depuis des siècles le centre du Perpignan important, l'institution se veut surtout une instance judiciaire chargée de juger toutes les affaires civiles et criminelles qui lui sont soumises; mais elle est aussi une instance politique, puisqu'elle est automatiquement saisie de tout sujet impliquant la relation avec notre nouveau royaume.
Qui dirige ce Conseil? C'est là que les choses se compliquent. Et mon ami Athanase de Mostuéjouls, idéalement placé à la forteresse, me raconte parfois que les réunions en sont souvent houleuses et qu'elles ont du mal à décider quoi que ce soit, tant tous veulent s'en assurer le contrôle. Il faut dire qu'on y trouve un beau monde très hétéroclite: des Catalans ralliés à la France, des Espagnols en rupture avec la couronne vieillissante de Philippe IV, des Français nommés là pour essayer de jouer le rôle d'arbitres (notamment un certain Charles Macqueron, dont on dit qu'il prend de plus en plus d'importance dans la région).

Ceci pour dire que, finalement, il n'y a pas vraiment de réponse simple à la question posée par le titre de ce billet...
Qui nous gouverne? À Perpignan, c'est très changeant au gré de l'influence fluctuante des uns et des autres. Hors de la ville, c'est souvent les plus influentes des familles locales, à condition qu'elles ne s'opposent pas trop ouvertement aux nouveaux maîtres français. Et dans les plus lointaines des vallées et des paroisses, c'est encore bien souvent les seigneurs locaux (rarement riches, pourtant) appuyés par les batlles qu'ils désignent pour les seconder.

Quelque chose me dit qu'on n'est pas sur le point d'en finir avec les ambitions contradictoires des uns et des autres...
Et qu'une réelle paix n'est pas pour demain dans notre société!...

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Els pescadors

Publié le par Jaume Ribera

Je vous l'ai déjà dit: la mer n'est pas notre amie. Du moins n'est-elle pas l'amie de la plupart de mes contemporains, y compris dans une cité comme Argelès qui est si près d'elle.

Il faut nous comprendre: c'est par la mer que durant des siècles sont arrivés les ennemis, en des temps où la chaîne de montagnes nous apportait une protection contre les conquérants venant du Sud. Par ailleurs les tempêtes et le mauvais temps, fréquemment violents dans notre région, nous viennent aussi le plus souvent de la mer.

Non, la mer n'est pas toujours pour nous une voisine paisible et accueillante

En conséquence, rares sont ceux qui tirent subsistance de l'étendue marine. Et alors que d'assez nombreux pescadors (pêcheurs) fréquentent les étangs que nous connaissons, le long du littoral ou même à l'intérieur des terres, rares sont ceux qui osent s'aventurer en mer.
D'ailleurs, ils ne vont pas loin. Pas question de s'éloigner trop de la cote. Ils ont l'habitude de plaisanter en disant qu'ils aiment tellement leur terre catalane qu'ils ne veulent pas la perdre de vue. Mais la vérité, c'est qu'ils ne veulent pas partir au large.

Ils ne le pourraient de toutes façons pas! Les barques des quelques pêcheurs qui quittent la terre ferme ne sont pas construites pour leur permettre d'affronter des flots susceptibles de s'agiter soudain.
Nos barques ne sont pas très éloignées de celles dont Patrick m'a dit que vous les appelez "barques catalanes", amoureusement décorées et abondamment exposées aux regards sur les plages de nos quelques ports. Mais elles sont plus sobres, plus fonctionnelles pour tout dire.
De petite taille, elles ne dépassent pas 3 ou 4 toises (traduction de Patrick: entre 7 et 8 mètres). Elles sont à fond plat, pointues de façon identique à la poupe et à la proue. Équipées d'une voile, elles se manœuvrent aussi par les avirons, ce qui augmente leur maniabilité d'autant plus qu'elles sont légères.

Rassemblées sur la plage, en attendant de reprendre la mer

Tout cela est certes très pratique pour naviguer, mais est également assez fragile. C'est pour cela que ces petites barques sont surtout utilisées dans les ports de la Côte rocheuse, là où la montagne pyrénéenne se jette dans la mer.

Il n'y a guère que deux ports qui ont un peu d'importance. Collioure, bien sûr, et Banyuls de la Marenda. Entre les deux, Port-Vendres n'est quasiment plus peuplé et a perdu une large partie de son activité. Même si des rumeurs disent que les Français ont pour projet de lui redonner son importance passée.

De multiples anses et criques, mais très peu de ports

Après Banyuls, il n'y a guère que de rares maisons accrochées aux rochers, même pas regroupées en hameaux (sauf le minuscule Cerbère). Tout le long de la côte rocheuse, se trouvent entre ces bourgades de nombreuses petites criques et autant d'anses discrètes, pas toujours accessibles de la terre ferme, dans les recoins desquelles il est loisible de venir pêcher à l'abri de la houle du large.
Alors bien sûr, dans ces lieux, il existe des familles de pêcheurs. Certaines le sont depuis plusieurs siècles, d'ailleurs. Cantonnées dans une pauvreté réelle, tant il y a peu de profits à faire dans cette activité. S'il y a peu de pêcheurs, c'est aussi parce qu'il y a peu de consommateurs. Les coquillages et quelques crustacés sont certes présents dans notre cuisine. Les poissons le sont moins, hormis la bullinada dont je vous reparlerai.

Ceci pour dire qu'els pescadores ne roulent pas sur l'or. C'est sans doute pour cela que tout le long de la côte, se multiplient toutes sortes de trafics, surtout depuis que cette zone rocheuse est devenue frontalière.

Il faudra que de cela aussi, je vous en reparle...

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Perpignan la souterraine

Publié le par Jaume Ribera

Comment le dire de la façon la plus simple, mais la plus correcte, qui soit? En fait, il existe deux villes superposées à Perpignan.

L'une grouillante de population, aux ruelles multiples et entrelacées, aux innombrables églises et chapelles, est celle que nous connaissons tous. Celle dont les plans décrivent l'ordonnancement finalement assez chaotique.

Le Perpignan de mon époque

Cette ville a un souci majeur, que Patrick évoque souvent dans les romans qu'il consacre à mes enquêtes: elle est presque dépourvue d'eau. D'eau courante, je veux dire. Celle que les habitants consomment et utilisent pour leurs besoins les plus immédiats. La Bassa, dont le débit n'est pas toujours très abondant d'ailleurs, coule à l'extérieur des remparts, qu'elle longe au nord de la vile. Quant à la Têt, elle est encore plus éloignée. Nul cours d'eau pour le moins sérieux ne pénètre dans la ville.

Alors il a fallu s'organiser. Tôt.
Lorsque Perpignan est devenue capitale du royaume de Majorque, au XII° siècle, et lorsque les rois y ont fait construire leur palais qui sert de forteresse de nos jours, il a bien fallu trouver des solutions pour faire arriver l'eau, au moins jusqu'au siège du pouvoir royal.

La solution consistant à creuser des puits était certes la plus pratique, puisque la proximité de la mer et des anciens marécages (pas encore tous asséchés, à l'époque de la fondation du royaume de Majorque) faisait que les nappes d'eau n'étaient jamais très lointaines. Mais cette solution ne pouvait pas être utilisée partout. Le coût des puits faisait hésiter les consuls de la ville. Et d'autre part, il y a plusieurs collines à l'intérieur de Perpignan (dont une au niveau du Palais, d'ailleurs), ce qui obligeait à des creusements beaucoup plus profonds et difficiles à entretenir.

Alors on est allé chercher l'eau ailleurs. Dans les rivières descendant des montagnes du Conflent, plus précisément. Un long canal, qui prit le nom de Canal royal, fut construit. Mais encore fallait-il que l'eau qu'une dérivation apportait vers Perpignan pût entrer dans la ville et surtout pût y être stockée, et enfin distribuée dans toute la cité.

Pour faire entrer l'eau, il suffisait d'en franchir les murailles. Ce qui fut fait en doublant certaines entrées de la ville de petits aqueducs. Il en exista deux. L'un arrivait du côté de la porte Saint Martin, à l'ouest de la ville. Mal entretenu, et fortement endommagé durant les années de guerre, il ne sert quasiment plus. En revanche, celui qui arrive près de la citadelle et de la porte d'Elne, lui, est toujours en fonctionnement.

L'aqueduc de la porte d'Elne (avant que celle-ci soit murée, bien après l'époque de Jaume)

Et c'est là que commence l'histoire de Perpignan la souterraine!...
L'eau qui arrive par ce fragile aqueduc est tout d'abord stockée dans un immense réservoir. Le premier fut creusé sous le palais royal lui-même. Mais il a été agrandi depuis.

Ce réservoir est une immense salle voûtée, de construction solide, dans laquelle les lecteurs de ma dernière enquête ont pu pénétrer. À partir d'elle partent de nombreuses canalisations, dont le rôle est de conduire l'eau dans tous les quartiers de la ville.

Un lieu très impressionnant, et vital pour la ville

Peut-être un jour quelqu'un étudiera-t-il tout ce réseau caché (Patrick me dit que certains sont en train de le faire, à vote époque). Alors bien sûr, quand j'ai titré "Perpignan la souterraine", j'ai un peu joué sur les mots. Car personne ne vit là!
Mais comment ne pas penser, lorsqu'on marche dans la ville, que sous nos pas se trouve un aussi dense réseaux de canalisations? Certaines sont abandonnées, et bien sûr à votre époque elles ont été remplacées (ou complétées) par des systèmes différents. Mais nombreuses sont celles qui sont encore en service, de mon temps.
À l'autre bout de ces canalisations, l'eau se déverse dans autant de petits réservoirs qu'il y a de fontaines dans Perpignan. Et Dieu sait qu'il y en a beaucoup, et de très anciennes!

En haut: canalisation souterraine; puis les fontaines du Mas Saint Jean (la plus ancienne), des Carmes, de l'Hôpital et des Potiers
En haut: canalisation souterraine; puis les fontaines du Mas Saint Jean (la plus ancienne), des Carmes, de l'Hôpital et des PotiersEn haut: canalisation souterraine; puis les fontaines du Mas Saint Jean (la plus ancienne), des Carmes, de l'Hôpital et des Potiers
En haut: canalisation souterraine; puis les fontaines du Mas Saint Jean (la plus ancienne), des Carmes, de l'Hôpital et des PotiersEn haut: canalisation souterraine; puis les fontaines du Mas Saint Jean (la plus ancienne), des Carmes, de l'Hôpital et des Potiers

En haut: canalisation souterraine; puis les fontaines du Mas Saint Jean (la plus ancienne), des Carmes, de l'Hôpital et des Potiers

Car c'est grâce à ces multiples fontaines que les habitants peuvent venir chercher (en veillant à éviter les gaspillages) le liquide si précieux.

Aux fontaines, et à toutes les installations de Perpignan la souterraine!...

Publié dans Ma région

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Cabestany

Publié le par Jaume Ribera

C'est donc à Cabestany, vous le savez maintenant, que s'est déroulée ma dernière enquête, qui a donné lieu au quatrième roman écrit par Patrick.

Je ne connaissais pas Cabestany. C'est un tout petit village, tout proche de la grande ville de Perpignan (côté citadelle).

À peine une demi-lieue catalane sépare Cabestany des murailles de Perpignan

Un village un peu étrange, en vérité. L'église y est totalement excentrée, au lieu d'être au cœur des maisons, comme c'est souvent le cas dans les villages les plus petits. Et les habitations, loin d'être regroupées et serrées les unes contre les autres, sont souvent séparées par de petits jardins, ou même par des correcs, ces petits ruisseaux (la plupart d'entre eux étaient à sec quand j'y suis allé) servant à la fois à l'arrosage et aux besoins d'eau pour les habitants. Alors que beaucoup des petits villages de notre région donnent l'impression d'une population très regroupée, Cabestany m'est apparu comme un village éclaté, presque sans ordre dans ses constructions.

En grisé, les maisons et autres constructions

Cela tient peut-être aux origines du village. Le curé du lieu, que j'ai beaucoup rencontré durant les quelques jours que Francisco et moi avons passés là-bas, m'a expliqué que les premières mentions de Cabestany dans les textes anciens datent de la fin du premier millénaire. Et à l'époque, l'endroit était un simple village de pêcheurs. Ne cherchez pas sur la carte: il n'y a pas d'étendue d'eau aux alentours, et la mer est quand même éloignée.

Alors... Pêcheurs où? Dans un étang qui se trouvait au Sud-Est du village (en bas à droite du plan ci-dessus), qui a fait partie des nombreuses étendues d'eau asséchées par les Templiers aux XII° et XIII° siècles. Je vous ai parlé, dans un texte antérieur, de cet assèchement massif des étangs de la côte et de la plaine. C'était d'abord pour rendre la région plus salubre (ces étendues d'eau étaient peu profondes, donc assez largement stagnantes et constituaient un paradis pour les insectes divers). Mais c'était aussi pour augmenter les surfaces agricoles, pourvoyeuses de revenus. Pas fous, les Templiers obtinrent des droits féodaux sur toutes les terres ainsi asséchées.
Et quand l'Ordre du Temple fut détruit, c'est l'Ordre des Frères Hospitaliers qui récupéra tous ces droits. D'ailleurs, à l'heure actuelle, Cabestany est toujours contrôlé par la commanderie Hospitalière de Bajoles et par son revêche commandeur, Ramon de Soler.

Petit village, faible population donc. Il n'y a pas plus d'une trentaine de focs (les foyers, unité de compte des populations à mon époque; on estime qu'un foc représente 5 personnes en moyenne). Et pas plus de deux grosses fermes, hormis les mas environnants (pas très nombreux, d'ailleurs) vers Saleilles et surtout Saint Nazaire.

C'est pour cela que la meurtrière maladie qui a soudain frappé le village y a été une telle tragédie!...
Mais cela, c'est le livre de Patrick qui vous le racontera...

Le roman narrant ma quatrième enquête

 

Publié dans Ma région

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