Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Sorède

Publié le par Jaume Ribera

Géographiquement, Sorède est l'une des paroisses les plus proches de ma cité d'Argelès. Et pourtant, les liens ne sont pas vraiment étroits entre nos deux communautés. Hormis quelques mas, situés à l'entrée ou le long de l'étroite vallée qui monte vers la Pava et Lavall, il n'y a guère de liens entre nous. Pourtant, si j'en crois Francisco, le village est aussi ancien que le nôtre: il est cité dans des actes dès le IX° siècle, à l'époque où s'est enfin regroupé et stabilisé au pied des Albères un habitat jusqu'alors éparpillé.

Deux cités voisines au pied de la chaîne des Albères

Mais il est vrai que Sorède a une particularité, en notre pays catalan: ses seigneurs sont une famille française. Et ce, bien avant le traité de 1659. Alors que tous les seigneurs locaux sont catalans (du nord ou du sud des Pyrénées, peu importe...), le jeu des alliances successives a transmis la seigneurie de Sorède dans les mains d'une famille qui ne l'était pas. Il s'agit des seigneurs de Foix et de Béarn, alliée d'assez loin à la famille royale française.
Durant le dernier quart du XV° siècle, un Guillaume de Foix et Béarn fut possessionné de plusieurs terres en Roussillon par son frère Jean. Il est probable que ce Guillaume était un fils bâtard de leur père, mis ainsi à l'écart du noyau familial. Lui et ses descendants se sont certes installés à Perpignan et dans leurs propriétés voisines. Mais ils ont toujours été considérés comme français, et pas catalans. Même si le rameau familial prospéra. Et si c'est le mariage d'Ange de Foix et de Béarn (grand-père de l'actuel chef de famille) avec l'héritière de la seigneurie de Sorède qui fit entrer cette terre dans la famille, où elle est toujours.

Sorède n'est pas un village très grand, et ses possessions dans la plaine ne sont pas significatives: il est coincé entre l'importante seigneurie de Laroque et la cité d'Argelès, bien mieux située et plus dynamique. C'est en montagne, sur les flancs des Albères, que les possessions du village sont importantes. Le territoire de Sorède contrôle tout le versant irrigué par les rivières de la Maçana et de la Resclosa, avec leurs multiples affluents de montagne. Et les hameaux de la Pava et de Lavall, que je vous ai déjà présentés.

Dominé par les montagnes, un village traversé par un torrent capricieuxDominé par les montagnes, un village traversé par un torrent capricieux

Dominé par les montagnes, un village traversé par un torrent capricieux

C'est un paysage de forêt souvent impénétrable, très riche en faune et en essences diverses. Moins cultivées que celles qui dominent Argelès, ces terres ont moins contribué à la prospérité du village qui est donc constamment resté dans l'ombre de ses voisins.

De plus, contrairement à ses voisins Saint André et surtout Saint Genis, Sorède n'a jamais été le lieu d'implantation d'une communauté religieuse. Son église est restée une simple église paroissiale, vouée à Saint Assiscle et Sainte Victoire, et plusieurs fois détruite et reconstruite. Patrick me dit d'ailleurs que celle que je connais n'est pas celle de votre temps: de nouvelles destructions ont affecté l'endroit, me dit-il sans vouloir entrer dans les détails.
Ce qui souvent chez lui signifie que je serai peut-être témoin de ces événements...

La vraie gloire de Sorède, finalement, est le très ancien château d'Ultrera, dont je vous ai déjà parlé. Il est la principale propriété des actuels seigneurs, dominant toute la plaine qu'il servait à contrôler, lors de son édification.

Mais lui aussi, paraît-il, est voué à disparaître. N'en aurions-nous pas fini avec les drames et les destructions?
Sorède et ses environs seraient-ils appelés à être l'objet de sombres rivalités?

Publié dans Ma région

Partager cet article
Repost0

Le Vallespir

Publié le par Jaume Ribera

Cela fait longtemps que je ne vous ai pas parlé d'une des régions qui composent notre Catalogne située sur le versant septentrional des Pyrénées.

Le Vallespir est l'espace qui prolonge les Albères le long de la nouvelle frontière avec l'Espagne. Il suit le cours du Tech, jusqu'à ce que les pentes du massif du Canigou constituent le point de jonction avec le Conflent.

Une région toute en longueur, aux multiples particularismes locaux

De Céret à Prats de Mollo, et de Montferrer à Lamanère, la région s'étire comme un long ruban, encaissée entre le versant pyrénéen au sud et les contreforts du massif du Canigou au nord. Au centre, coule le Tech. La rivière n'a rien du large cours d'eau finalement assez paisible qui vient finir sa course dans la mer, entre Argelès et Elne.

De plus en plus large, de plus en plus paisible...De plus en plus large, de plus en plus paisible...De plus en plus large, de plus en plus paisible...

De plus en plus large, de plus en plus paisible...

Elle est longtemps un simple torrent de montagne, qui s'enrichit progressivement des affluents qui la rejoignent. Mais comme la pente est forte, et que les bords sont encaissés, le cours du Tech est très capricieux, et donne parfois lieu à de spectaculaires crues, très destructrices.
C'est pour cela que dans le Vallespir, nombreux sont les villages perchés, hors d'atteinte des flots parfois en colère. Alors que la logique, et la sécurité des habitants, auraient voulu que les habitations fussent cachées au fond des vallées, ce n'est pas le cas pour tous les villages, et je dirai même pour la majorité d'entre eux.

Bien sûr, il y a des exceptions. Et aussi bien la grande ville du Vallespir qu'est (à mon époque) Prats de Mollo que les Bains d'Arles, plus en aval (ce petit hameau s'appelle Amélie, pour vous) se sont édifiés sur le cours de la rivière. Mais même dans ce cas, ces villages soit se sont fortifiés contre elle, soit ont été construits sur des rochers en hauteur, pour mieux se préserver de ses colères soudaines, que nous appelons les aïguats. Patrick me dit d'ailleurs que le plus récent (pour vous) de ces phénomènes brutaux a complètement détruit le village du Tech (qui porte le même nom que la rivière), et qu'il a fallu le reconstruire.

Le village du Tech, avant / après les inondations de 1940. Nul doute que de tels désastres se produisirent aussi aux temps anciensLe village du Tech, avant / après les inondations de 1940. Nul doute que de tels désastres se produisirent aussi aux temps anciens

Le village du Tech, avant / après les inondations de 1940. Nul doute que de tels désastres se produisirent aussi aux temps anciens

Contrairement aux Aspres, dont je vous ai parlé, le Vallespir est une région fortement boisée, et couverte de végétation. La moyenne montagne qui la recouvre presque entièrement l'explique. L'humidité des très nombreux torrents et cours d'eau descendant des sommets environnants aussi.
Mais à mon époque, c'est une région qui est encore assez pauvre, même si elle se redresse peu à peu. Elle a été très touchée par les épidémies qui ont marqué le siècle qui m'a précédé (le seizième), et qui ont entraîné une disparition totale de la population dans certaines vallées. En effet, comme il n'y a pas beaucoup de richesses agricoles à espérer d'un sol trop caillouteux pour être facilement exploitable, ceux qui survécurent sont souvent partis chercher des lieux plus hospitaliers, soit dans la plaine, soit plus loin en Catalogne.

L'espace, donc, devait être repeuplé. Ce fut la chance du Vallespir, qui devint durant les trois ou quatre dernières décennies de ce même seizième siècle le point de refuge de tous ceux qui, en Limousin, en Béarn, en Comminges, en Rouergue... fuirent les conflits religieux entre catholiques et protestants qui ravagèrent tout le sud de la France. La couronne espagnole eut l'intelligence de leur céder généreusement d'importantes terres, à condition qu'elles fussent mises en valeur par ces nouveaux arrivants. De véritables fiefs familiaux, peu à peu, se constituèrent, dont un des plus remarquables est celui de la famille Trescases (venue du Béarn) à Cos, entre Le Tech et Montferrer.

Contrairement aux Aspres (et même au Fenouillèdes), c'est toutefois toujours à l'abri d'une végétation dense et protectrice que se produit le lent renouveau du Vallespir. Une végétation qui contribue pour beaucoup au charme et aux mystères de cette région...

Que se passe-t-il, à l'ombre de ces chênaies?...

 

Publié dans Ma région

Partager cet article
Repost0